Planifier les villes pour les enfants et si possible avec eux, c’est une bonne manière de créer des quartiers, des rues et des espaces publics plus sûrs pour tout le monde. Mais de telles démarches sont très rares chez nous, où les documents d’urbanisme sont obnubilés par la prise en compte d’une masse croissante de règles d’où les enfants sont exclus. Cela dit, rien n’interdit d’exprimer dans ce cadre un projet urbain qui fasse expressément référence aux besoins spécifiques des enfants.
Histoire de changer un peu les pratiques, une première chose à faire serait de jeter un coup d’œil à la convention internationale des droits de l’enfant, ratifiée par la France en 1990. Rappelons au passage que selon notre Constitution, les conventions internationales ratifiées ont « une valeur supérieure à celle des lois ». On y lit ainsi que « l’enfant a droit à la liberté d’expression », que l’éducation de l’enfant doit « viser à l’épanouissement de la personnalité de l’enfant et le développement de ses dons et aptitudes mentales et physiques » et que « les États parties reconnaissent à l’enfant le droit au repos et aux loisirs, de se livrer au jeu et à des activités récréatives », etc, donc on a déjà là les bases d’un bon programme de travail – rien que pour permettre aux enfants de s’exprimer sur les projets urbains, il y a de quoi faire.
Une étape suivante peut être de regarder comment les Suédois s’y prennent, dans leur pays ou « l’enfant est roi » à ce qu’il paraît, pour aborder la question dans leurs documents d’urbanisme. Le Schéma directeur de la ville d’Umeå, que j’ai consulté juste parce que je connais la ville, contient les orientations suivantes :
La ville doit offrir de bonnes conditions aux enfants en ville. Il s’agit d’adapter l’espace urbain aux besoins des enfants et de créer des environnements qui leur permettent de se déplacer, de jouer, d’expérimenter et de grandir sans être exposés à des risques pour la santé ou leur sécurité.
Plusieurs facteurs contribuent à restreindre la liberté de mouvement des enfants. L’une des raisons est que le trafic automobile a augmenté ces dernières années. Des conditions de trafic sécurisées, adaptées aux conditions de l’enfant, sont donc essentielles pour créer des environnements urbains attrayants pour les enfants et leurs familles. La façon dont les enfants peuvent se déplacer librement dépend principalement de l’existence d’un réseau sécurisé de chemins de promenade cyclables qui mènent à des lieux importants pour les enfants, tels que les écoles, les installations sportives, les aires de jeux et les lieux centraux. Les habitudes de déplacement des enfants ont un impact significatif sur la santé, l’accessibilité et les facteurs sociaux. Nous créerons des environnements qui incluent l’activité physique dans la vie quotidienne et contribuent à une meilleure santé. Il s’agit par exemple de pouvoir aller à vélo à l’école au lieu d’être conduit en voiture. Il est important que les enfants prennent de telles habitudes tôt.
Les enfants ont besoin de bons environnements extérieurs qui invitent à jouer, qui soient à la fois sauvages et calmes. Ils ont également besoin d’espace pour découvrir le monde seuls ou avec d’autres enfants. Il est important que l’environnement urbain ne limite pas cette liberté aux jeux spontanés. Un parc de district plus vaste peut ainsi offrir un espace pour des jeux plus exigeants et des excursions plus longues. La planification urbaine a une responsabilité majeure pour déterminer dans quel environnement sont placées des écoles ou des aires de jeux. Parmi les facteurs à prendre en compte figurent l’emplacement de ces lieux par rapport aux routes et à l’intensité du trafic routier.
Ne serions-nous pas capables d’écrire de telles orientations dans un SCOT (Schéma de cohérence territoriale) ou dans un PLU (Plan local d’urbanisme) ?
Nous verrons ultérieurement comment le plan d’urbanisme d’Umeå traduit ces orientations.
Date de l’article d’origine : 2 octobre 2017