Quelle vie sociale après la disparition d’un étang ?

Pêcheur au bord de l’étang de Peyrelevade (2008).

Un lecteur me demande si je sais quelque chose sur l’évolution de la vie sociale après la disparition de l’étang de Peyrelevade en 2020 (voir article précédent) pour cause de renaturation de la Vienne, et à la vérité je n’en sais pas grand-chose car mes souvenirs de 2008 sont lointains, et à l’époque je ne m’intéressais guère à ce sujet. Toutefois, le CAUE de la Creuse avait eu la bonne idée de réaliser avant les travaux une « étude socio-paysagère », basée sur une enquête auprès de 31 personnes – mais sans observations des pratiques réelles sur le terrain. Il en ressort un assez médiocre attachement à l’étang, dont le charme m’avait pourtant frappé en tant qu’usager du camping municipal. Contrairement à une information qui m’a été donnée récemment, la baignade n’y était pas possible, et apparemment il n’y avait pas grand-chose à y faire, à part se balader autour et y pêcher. Une habitante affirmait même avoir préféré le site à une époque où l’étang avait été vidangé et où la végétation commençait à s’y réinstaller.

Si 70 % des personnes interrogées étaient opposées à l’effacement de l’étang, il y a eu des propositions variées pour le site renaturé, dont un parcours pédagogique, un parcours de santé et une piscine écologique.

Image PNR Millavaches

Quatre ans après les travaux, le site est méconnaissable mais demeure bien vivant. Les truites étant revenues, les pratiques de pêche ont changé mais restent populaires. Une ancienne tourbière est réapparue et un sentier d’interprétation y a été aménagé, en réponse à la demande d’un parcours pédagogique. Le camping est toujours là et, en tant qu’usager à nouveau, je dois dire que le site reste bien agréable. Finalement cette renaturation semble avoir été bien acceptée, et les habitants ont plaisir à voir à nouveau couler la Vienne, même si j’en ai trouvé un qui regrettait l’étang.

Cette histoire me ramène au livre Le grand rafraîchissement de Benoît Duteurtre, que j’ai un peu étrillé récemment et dans lequel l’auteur regrette la disparition d’un étang qu’il aimait et qui remontait au 18e siècle : « Des experts en environnement ont préconisé de rendre au ruisseau sa forme initiale. La commune a sauté sur l’occasion puisque le démantèlement du barrage évitait des travaux d’entretien devenus hors de prix. C’est ainsi, au nom du respect de la nature primitive, qu’un charmant paysage imaginé par les humains s’est trouvé annulé en plein cœur de la montagne. J’y passais parfois, tristement, ces dernières années, hâtant presque le pas à l’emplacement de l’étang disparu où flottaient encore mes souvenirs de pêcheur à la truite ». L’auteur imagine que le maire, « influencé par les idées nouvelles, avait décidé de reconstruire le barrage, au nom du lien éternel entre l’homme et la nature. Il revenait en arrière – mais moins en arrière que ces protecteurs de l’environnement qui désiraient nous renvoyer au néolithique ». Comme quoi on a beau être réac, il y a quand même des limites. Et à propos de réactionnaire, on se demande ce qu’en penserait Sylvain Tesson, mais c’est un autre sujet.

Pour en savoir plus sur l’opération de Peyrelevade, une petite vidéo bien faite ici.

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