C’est la largeur moyenne d’un des meilleurs sociotopes de Bretagne intérieure – en l’occurrence le chemin de halage longeant le Blavet canalisé. Quelques observations sur ce « sociotope linéaire » après l’avoir pratiqué à vélo dimanche dernier :
– 2,10 m, ce n’est pas beaucoup pour une voie verte, et c’est un peu juste pour faire cohabiter promeneurs à pied, joggers, cyclistes chevronnés ou débutants, handicapés en fauteuil roulant, rollers… Et pourtant ça marche plutôt bien. Par son étroitesse, cette voie est un exceptionnel lieu d’apprentissage du respect d’autrui : on ralentit, on donne un coup de sonnette, on rattache son chien, on se parle (« Après vous » !), éventuellement on s’engueule un peu aussi, on apprend aux enfants à faire attention aux autres, on se dit bonjour, on échange des sourires… Par la vertu de cette cohabitation étroite (le dimanche, on est dans la densité !), et les petites fleurs aidant, la France aigrie des jours de semaine se métamorphose en un modèle d’harmonie et de respect. Qu’en serait-il si chaque catégorie d’usagers était canalisée sur sa voie spécifique ?
– Ce chemin de halage est bien un sociotope, et pas seulement un tuyau permettant d’aller de A à B. Il est un espace en lui-même, lieu d’une intense vie sociale, et les espaces ouverts adjacents du domaine public fluvial (écluses, passerelles, îles, abords herbeux des maisons éclusières…) accueillent une multitude d’activités. Chaque élargissement du parcours est utilisé, surtout s’il y a de l’herbe, une vue sur l’eau, une exposition ensoleillée ou à l’abri du vent. Ces observations suggèrent qu’une voie verte réussie en tant que sociotope doit avoir par endroits de l’épaisseur et offrir de part et d’autre des espaces publics herbeux et équipés de quelques bancs.
– Ce type de voie est un lieu de mixité sociale et générationnelle comme il en existe peu : des enfants faisant leurs premiers pas ou leurs premiers tours de roue, aux couple âgés cheminant lentement la main dans la main, des pépés à casquette des villages environnants aux jeunes sportifs urbains en tenues pétantes, en passant par les tribus en pique-nique, tout le monde est réuni par quelques valeurs communes : le calme, la verdure, l’eau, l’activité physique, la rencontre des autres…
Compte-rendu illustré à télécharger ici.
Date de l’article d’origine : 18 avril 2011