Du côté des petits vieux (suite)

Le plan d’eau en contrebas de l’Ehpad.

Nous avons évoqué à plusieurs reprises les difficultés que peuvent rencontrer les pensionnaires des Ehpad (établissements hospitaliers pour personnes âgées dépendantes) pour profiter des espaces extérieurs. En voici une nouvelle illustration, tirée d’un entretien que j’ai eu aujourd’hui avec l’animatrice de l’Ehpad d’une petite ville de Bretagne centrale.

L’établissement, moderne et bien tenu, occupe une situation a priori très favorable puisqu’il se situe à 200 m seulement du centre-ville et qu’il donne directement sur un parc public de 6 ha entourant un plan d’eau. Ce n’est donc pas un lieu de relégation, perdu au milieu des champs ou au fond d’une zone d’activités. De plus, les gestionnaires ont eu la bonne idée de ne pas clôturer l’établissement côté ville, de sorte que la verdure qui l’entoure est librement accessible à tout un chacun – on n’y ressent pas cette impression d’encagement qui caractérise d’autres Ehpad tels que celui-ci.

La liaison entre l’Ehpad et le parc : en fauteuil, on ne passe pas.
Le chemin « stabilisé » en hiver…

A première vue donc, tout va bien, sauf qu’en pratique, c’est plus compliqué. La promenade du parc public est à 38 m du bâtiment principal, donc pas très loin, mais les pensionnaires en fauteuil roulant ne peuvent pas y aller, car le portillon qui y donne théoriquement accès débouche sur un terrain en pente et où aucun cheminement approprié n’a été aménagé (voir photo). De plus, la promenade entourant l’étang est en « stabilisé », et chacun sait que ce genre de terrain est tout sauf stable sous un climat pluvieux. Il y a de la boue, des flaques, des ornières… et les conditions sont difficiles pour les engins roulants. Autre problème, l’absence de toilettes, qui peut être une forte contrainte avec des personnes âgées et qui contraint souvent à écourter les promenades. Enfin, il manque des bancs, ceux qui pourraient être utilisés sont en plein soleil l’été… Le résultat, c’est que pour balader les pensionnaires autour d’un plan d’eau, il faut prendre un véhicule aménagé et les conduire à 15 km de là, à un endroit où il y a un parcours confortable, des toilettes et des bancs et tables à l’ombre.

Côté ville, ce n’est pas mieux. Les trottoirs sont inexistants, ou trop étroits, ou cahoteux, ou encombrés, il faut traverser et retraverser une rue pour contourner ces difficultés… Pourtant, certains pensionnaires sont autonomes et ne demanderaient pas mieux que d’aller dans des magasins ou au café, ou se poser sur la place pour voir du monde. En pratique, ils n’y vont donc pas sauf, là encore, avec la camionnette de l’Ehpad pour faire 200 à 300 mètres.

Au fait, qu’est-ce qui intéresse les « anciens » dans un plan d’eau, et de quoi y parlent-ils ? D’après l’animatrice, à part le spectacle de l’eau elle-même, ce sont la végétation, les animaux et notamment les oiseaux, la pêche, mais aussi l’évocation de souvenirs personnels liés à l’aspect ou à l’usage des lieux autrefois – l’activité de « flirt » y tient d’ailleurs une bonne place, ce qui confirme ce qui a été dit ici à propos des « bois d’amour » et « îles d’amour ». Si d’aventure il faut supprimer certains de ces plans d’eau au nom de la noble cause du « rétablissement des continuités écologiques », il va peut-être falloir trouver des compensations à ces menus plaisirs, si l’on veut faire un peu attention aux gens, et l’affaire s’annonce compliquée. Mais nous en reparlerons.

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