Autopsie d’un jardin de co-propriété

Ce 7 janvier 2022, je visite à Rennes un appartement dans un grand immeuble (14 étages, 110 m de long), qui m’a l’air d’héberger quelques centaines d’habitants. Cet appartement donne vue, vers l’arrière de l’immeuble, sur un petit parc de 6600 m², qui est du plus beau vert sous le soleil entre deux averses. Même les allées et l’aire de jeux sont couverts d’herbe et on n’y discerne pas de signes de passage régulier, ce qui me suggère un constat navrant : apparemment, personne ou presque ne vient ici, bien que cette partie de Rennes soit à la fois densément peuplée et peu dotée en espaces verts.

Cette présomption est-elle fondée ? Le nouvel occupant de l’appartement vient d’emménager et manque de recul, je lui ai confié la mission d’observer ce qui se passe sous ses fenêtres et de m’en tenir informé. Après tout, il n’est pas impossible que ce parc se réveille à la belle saison ! Ensuite, en observant un peu, on commence à comprendre ce qui ne va pas.

Ce parc n’est pas public, il appartient à la co-propriété de l’immeuble, et une pancarte à chaque bout indique « propriété privée ». Ce n’est pas très « invitant », même si juridiquement, la mention « propriété privée » n’implique pas que l’accès soit interdit – cette interdiction doit être explicite, ce qui n’est pas le cas ici. Autre problème, les cheminements matérialisés vont grosso modo de n’importe où à nulle part, l’un deux vient d’ailleurs buter sur la clôture de l’Ehpad bien engrillagé qui se trouve de l’autre côté du parc. Je note aussi que l’immeuble lui-même ne s’ouvre pas correctement sur son parc. Il y a des portes qui peuvent peut-être permettre de sortir, je n’ai pas vérifié, mais une chose est sûre c’est qu’il est impossible de rentrer dans l’immeuble depuis le parc. C’est ennuyeux pour des enfants. Autre problème, des habitants ont l’habitude de jeter des détritus par leur fenêtre, et nul n’a envie de se prendre une litière de chat usagée sur la tête. Enfin, on a ici un cas très pédagogique pour mettre en œuvre les différents niveaux d’exposition de l’espace par rapport aux immeubles et à la voie publique : voir ici l’article dans lequel il est question de l’espace exposé (en pied d’immeuble), perturbé (jusqu’à une vingtaine de mètres), ambigu, et non perturbé. Si cette approche fonctionne, on a environ 40 % de la superficie du parc où il ne devrait y avoir personne, reste à voir si dans les 60 % restants des gens peuvent trouver quelque chose à faire – peut-être des enfants, dans l’aire qui leur est réservée. Un beau sujet d’observation pour les mois à venir, et de quoi se demander si les espaces verts de co-propriétés sont supposés être vivants ou seulement destinés à offrir aux résidents un décor soigneusement entretenu, et autant que possible silencieux.

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