Lu dans Le Monde du 19-20 juin 2022, ce gros titre en forme de mea culpa : « Canicule à Rennes : « On pensait la Bretagne épargnée »« . Pourquoi le serait-elle ? Lorsque le vent souffle entre le nord-est et le sud-est, il apporte en Bretagne, au bout de sa course, des masses d’air qui ont chauffé en ayant survolé la France voire l’Europe sans jamais passer au-dessus de l’eau. Et si l’effet de brise peut rafraîchir le littoral par temps calme, il est annihilé par un vent de terre soutenu. Donc la Bretagne est au moins aussi exposée à la canicule que n’importe quelle autre région de France, tant que le vent ne vient pas de la mer.
Toujours est-il que selon l’article, les autorités n’ont « pas suffisamment anticipé le changement climatique dans les réflexions urbaines ». Pour sûr, il y a là matière à reconsidérer l’aménagement des rues, des parcs et des places : sans aller forcément jusqu’à implanter des « forêts urbaines », des actions simples peuvent consister à placer ou déplacer des bancs dans des lieux ombragés, ou à planter des arbres pour apporter une ombre utile, ou même, avec un peu de budget, à implanter des points d’eau avec un robinet à poussoir.
Avant de se lancer, les Bretons pourraient entreprendre des voyages d’étude dans les Pays Chauds (au sud de la Loire, par exemple, ou assurément au sud de la Garonne), car ils y apprendraient pas mal de choses. Le 20 juin, justement, je me trouve dans la petite ville de Condom (Gers), admirant la judicieuse implantation des tables de pique-nique dans le parc au bord de la Baïse : chaque table est ombragée par un tilleul à l’heure du déjeuner. Un exploit, est-ce le résultat d’une formation de haut niveau ou simplement de ce qu’on appelle le « bon sens » ? Encore plus fort un peu plus loin : sur une place arborée, un petit abri ouvert sur les côtés (donc bien visible et sûr), avec un sol lisse et un banc incurvé parfait pour bavarder à plusieurs, comme quoi la perfection est bien de ce monde, malgré ce qu’on raconte.
Bien d’autres découvertes m’attendent en poursuivant vers le sud : dans le petit village de Trausse (Minervois), une placette comme on en voit plein dans le Midi, avec un bel arbre, un banc en dessous, et un point d’eau potable ; à Carcassonne, la zone d’attente des toilettes publiques (déjà présentée ici), agréablement ombragée ; à Bages (Aude), la jolie place de la Mairie avec ses vieux platanes, sa fontaine d’eau potable, ses terrasses de bistrots et ses bougainvillées ; ou encore, au bord du canal du Midi à Agen, la borne-fontaine intensément utilisée par les sportifs qui courent dans le secteur. Sans parler de toutes ces halles ouvertes qui peuvent être utilisées par tout le monde. Tout cela semble tellement évident et banal quand on habite dans ces régions… Mais à l’heure où j’écris ces lignes, et où il fait entre 33 et 36° dans les villes et villages de Bretagne, je me dis qu’il peut y avoir là quelques idées inspirantes… d’autant que certains de ces aménagements peuvent aussi servir par temps de pluie.