La municipalité de la ville où j’habite a décidé d’acquérir en 2020 un magnifique parc arboré de 3,8 ha, qui appartenait précédemment à une institution religieuse. C’est là une excellente idée, d’autant que ce parc se situe dans un quartier notoirement pauvre en espaces verts. Mais la question qui se pose maintenant aux élus et aux services est de définir les objectifs et le contenu du parc. Il a donc été décidé de lancer une concertation publique, de manière à ce que les habitants puissent faire part de leurs propositions – et préalablement, visiter ce parc que très peu de gens connaissaient. En parallèle, les élus ont aussi lancé un inventaire de la biodiversité du site, afin d’alimenter le projet et aussi de préserver la richesse du lieu contre toute intervention hâtive ou intempestive.
Il se trouve que j’ai été associé aux deux opérations, et que de plus j’habite non loin de ce parc que j’aperçois depuis ma fenêtre, ce qui me met aux premières loges pour suivre ce projet. Une première impression, c’est que l’appel aux propositions des habitants risque de produire une accumulation d’aménagements ou d’équipements, ou encore un découpage du site en sous-espaces à fonctions spécialisées : des jeux pour les enfants, un parcours sportif, des tables, des bancs, des poubelles, des animaux, un coin pour les chiens, une aire pour des spectacles, une autre pour jouer au foot, etc. Rien de grave a priori, mais il me semble qu’il serait dommage de se lancer dans ce genre d’aménagements sans avoir cherché à définir une vision pour le lieu : quelle image et quels genres d’attraits veut-on lui donner (rustique avec un aménagement minimal, favorisant des activités informelles que les usagers trouveront par eux-mêmes, ou alors avec des activités pré-déterminées…?), quels sont les besoins non satisfaits des habitants du quartier, quel rayonnement géographique envisager (s’agit-il d’un parc de quartier, ou d’un parc capable d’attirer des visiteurs de toute la commune ou de plus loin ?)… Une fois cette vision clairement exprimée, il devrait être plus simple de définir les aménagements à réaliser… ou à éviter. Mais cela nécessite un travail de concertation spécifique, et aussi des arbitrages par les élus.
Un deuxième thème intéressant à suivre va être celui de la biodiversité. La présence d’espèces ou d’habitats à caractère patrimonial peut générer des contraintes pour l’utilisation de l’espace, or on sait que dans ce domaine, « plus on cherche, plus on trouve ». On sait aussi que le thème de la biodiversité peut parfois avoir tendance à primer sur les considérations d’usage social, ce qui est peut-être très bien, mais peut-être pas très bien non plus. Donc là encore, on pressent la nécessité d’arbitrages entre « sanctuarisation » et parc d’attractions. L’année 2022 s’annonce riche pour le projet, il va être intéressant de voir comment celui-ci va se construire.