Les clôtures contre la vie sociale ?

Il y a quelques jours avait lieu un atelier public pour un projet de revitalisation de bourg, dans une commune péri-urbaine morbihannaise de 6000 habitants. Parmi les questions posées aux habitants regroupés par tables (bondées, car l’opération fait plus que le plein), il y a « Avez-vous l’impression d’être dans un bourg ou dans une ville ? » et « Préférez-vous que P. évolue vers un bourg ou vers une ville ? ». A la table que j’anime, on a un petit faible pour la ruralité « car ici les gens se connaissent », « dans notre bourg les gens se parlent, c’est pas comme en ville », « on se parle d’un jardin à l’autre, ou de la rue à un jardin ».

Pas mal non plus… vous en voulez d’autres ?
Mon Oncle, de Jacques Tati (1958)

J’ai là de quoi titiller les participants, car il me semble que le rôle d’un animateur n’est pas uniquement d’enregistrer la vox populi, mais peut-être un peu aussi d’inciter à réfléchir. Non content de demander traîtreusement si ces sympathiques échanges ont plutôt lieu quand les gens se déplacent en voiture (cas général ici) ou à pied, je demande aussi s’il est vraiment commode de se parler entre la rue et un jardin lorsque les gens s’enferment dans des forteresses étanches, souvent constituées de murs de parpaings surmontés de ces lames ou plaques de plastique opaques de couleur gris anthracite, et qui font fureur par les temps qui courent. Un ange passe, puis certains participants conviennent qu’effectivement, ce n’est pas le genre de chose qui facilite la vie sociale. Pour ma part, mais je n’ai pas à donner mon point de vue, il me semble qu’on est là dans un mode de vie pseudo-rural, où les gens ne sortent de leur voiture que pour se retrancher dans leur forteresse plastifiée. Un participant reconnaîtra d’ailleurs plus tard qu’ « ici, on ne voit personne dehors le soir tandis qu’en ville, on sort le soir » et un autre que « en ville, il y a des parcs où on peut se balader et se rencontrer, alors qu’ici il n’y a rien ». On dirait bien que le débat entre « ruralité » et « urbanité » est loin d’être clos. Et pour le moment, on peut toujours aller revoir Mon Oncle, de Jacques Tati, que nous célébrâmes ici et dans lequel il ridiculise joyeusement l’enfermement pavillonnaire moderne.

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