Le PLUI de Plaine Commune s’intéresse aux sociotopes

Nous avons parlé à plusieurs reprises des documents d’urbanisme qui ignorent la question de l’offre d’espaces verts. Il est temps de donner des exemples plus positifs, et nous allons nous intéresser au PLU intercommunal de Plaine Commune, un territoire de 440 000 habitants situé au nord de Paris, dans le département de la Seine-Saint-Denis.

Le rapport de présentation du PLUI, dans son volet « État initial de l’environnement » téléchargeable ici, propose sur 12 pages (35 à 46) une vraie réflexion critique et argumentée sur l’offre d’espaces verts, avec typologies, accessibilité, offre par habitant, inégalités et carences, et même une approche se référant à la méthode des sociotopes et conduite par Magali Paris. Il en ressort par exemple que « la carence en espaces verts est confirmée dans de vastes quartiers de La Courneuve (…), Pierrefitte-sur-Seine et Villetaneuse (…), Stains (…) », tandis que « Épinay-sur-Seine et Saint-Denis sont perçus comme bien pourvus en espaces verts ».

On apprend que « l’enquête et les entretiens auprès d’habitants de Plaine Commune ont permis d’identifier 116 sociotopes pratiqués par les habitants ». Trois critères (intensité et modalité d’usage, connectivité, perception paysagère) ont conduit à classer les sociotopes en cinq catégories :

  • Les sociotopes réserves, espaces où l’on se rend rarement (voire jamais) mais dont on connaît l’existence. C’est un sociotope important car on sait que l’on pourra y aller un jour. La possibilité de s’y rendre importe plus que la pratique effective du lieu.
  • Les sociotopes insulaires sont des espaces isolés car en limite du territoire habité et/ou il est difficile de s’y rendre et/ou ils ne répondent pas aux attentes de l’interviewé.
  • Les sociotopes de type séjour sont classés en fonction de ce qu’on vient y faire, recherche de diversité végétale et paysagère ou d’espace de jeux pour enfants par exemple…
  • Les sociotopes connecteurs se développent à large échelle (linéaires) ou à échelle réduite (ligne de désir/sente/raccourci). Ils connectent des éléments urbains ou des éléments d’une promenade.
  • Les sociotopes de type dépendances sont des espaces de nature situés en arrière-plan d’une infrastructure viaire ou naturelle.

Cette approche nouvelle et originale de la méthode des sociotopes mérite notre intérêt, notamment en ce qu’elle aide à comprendre comment les habitants pratiquent réellement l’espace, y compris en incluant cette notion d’espace qu’on ne fréquente pas mais dont on est content de savoir qu’il existe.

On pourra regretter que la carte « Accessibilité des espaces verts publics en 15 mn à pied » se base sur une distance « à vol d’oiseau » de 1 km, alors qu’on dispose aujourd’hui de méthodes bien plus fines permettant de calculer les trajets réels, sans parler de la méthode Depthmap, présentée ici, qui calcule les complexités de parcours. Le rapport reconnaît d’ailleurs candidement (p. 40) que « En théorie, sans tenir compte des difficultés d’accessibilité locales, l’ensemble du territoire de Plaine Commune est à moins d’un kilomètre (15 minutes à pied) d’un espace vert accessible au public ». Qu’est-ce qui empêchait donc les auteurs de prendre en compte ces difficultés, qui peuvent être tellement dissuasives dans la vie quotidienne ?

Autre limite, l’étude ne s’intéresse qu’aux espaces verts publics, et ne regarde pas si par hasard, il n’y aurait pas des usages sur des espaces non publics ou du moins non estampillés « espaces verts » – nous avons souvent rappelé ici que ce sujet était trop important, surtout dans les grandes villes, pour qu’on se contente d’en détourner le regard. On remarque d’ailleurs que le thème suivant du rapport (les friches) n’est traité que sous l’angle de la biodiversité à l’exclusion des fonctions sociales, qui pourtant doivent bien exister dans ces endroits.

Malgré ces quelques réserves, on apprécie de trouver la question des espaces verts enfin correctement traitée dans un PLUI, en réponse à une volonté locale d’améliorer l’offre et de réduire les inégalités sociales au regard des espaces verts.

Compte-rendu de l’expérience de Plaine Commune dans la revue Cybergeo, accessible ici.

Merci à Simon Georget pour l’information.

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