L’automne est le temps privilégié des cueillettes, et c’est d’ailleurs pourquoi il y a moins d’articles dans ce blog ces jours-ci : quiconque a épluché des kilos de châtaignes pour en faire de la confiture sait de quoi il retourne. Le sujet de la cueillette comme valeur de sociotope a déjà été abordé ici il y a plusieurs années, mais rien n’interdit d’y revenir.
Curieusement, nos amis suédois qui font de si belles étude de sociotopes ne mentionnent quasiment jamais la pratique de la cueillette, qui est au moins aussi populaire chez eux que chez nous. Ici, il suffit d’aller aux mûres au mois d’août ou aux champignons en ce moment pour constater que où que vous alliez, il y a en général des gens qui sont passés avant vous, que ce soit au fond d’un lotissement urbain ou au milieu de nulle part. Ce sont là des activités sociales, qui se pratiquent souvent en famille ou entre amis, et se prolongent à la maison pour les joies du nettoyage, de l’épluchage ou de la cuisson.
Notons aussi que la cueillette se pratique souvent n’importe où, y compris sur le terrain d’autrui et de préférence sans son autorisation, ce qui peut procurer quelques bonnes engueulades mais aussi les délicieux frissons du chapardage, si ce n’est la fierté du manant qui met lui-même en pratique, sans attendre le Grand Soir, quelques principes collectivistes aux dépens du propriétaire terrien. Qui ne s’est jamais goinfré de cerises dans le verger de son prochain ne peut connaître le prix de ces petits bonheurs, que connurent bien avant nous nos ancêtres paysans. Nous avons donc là, une fois de plus, la confirmation que la réalité des usages nous importe bien davantage que les considérations assez théoriques de statut foncier, qui voudraient que les activités de cueillette ne soient acceptables que dans les espaces publics.
Date de l’article d’origine : 18 octobre 2019