L’arbre de l’amitié et le rocher kitkat

Me baladant en soirée au bord du Blavet à Lochrist (Morbihan), je remarque de grands panneaux au bord de la rivière. Sur le premier figure une belle photo d’un groupe de quatre adolescentes, dont trois juchées dans un arbre, avec cette légende : « Ça fait huit mois qu’on se retrouve dans notre arbre de l’amitié au square Lenglier avant de prendre chacune son bus. On parle de tout, de fringues… la mode en ce moment, c’est les clous et la dentelle ! ». Que viennent faire ici ces collégiennes de Pontivy ? Les autres panneaux présentent de tout aussi belles photos de collégiens et m’intriguent : qui donc s’intéresse ainsi à des ados ?

Je reviens le lendemain pour voir la chose en plein jour, et là je découvre une vaste exposition en plein-air, œuvre de la photographe Stéphanie Tétu, intitulée « Le chemin des écoliers » et commandée par le Conseil Départemental du Morbihan. Cette approche me va droit au cœur, car nous sommes en plein dans nos sujets favoris – les enfants, les jeunes, les trajets et activités entre le domicile et l’école, etc. Les photos, pleines de vie, témoignent avec beaucoup de sensibilité du quotidien des élèves – des villes, des campagnes, des îles… – qui doivent pour certains faire de long trajets pour se rendre au collège. Elles nous montrent des univers d’arrêts de bus, de squares, de routes de campagnes, de cours de collèges, de parkings, de bouts de paysages entrevus à travers la vitre d’un autocar… Sur chacune d’elles apparaissent des jeunes qui n’ont pas forcément la vie facile, mais arrivent toujours à se trouver des espaces de liberté pour bavarder, rire, jouer, bouger, se bécoter… On y entrevoit l’importance sociale de l’arrêt de bus pour causer, du vélo et du scooter comme moyens d’autonomie, ainsi qu’une capacité confondante à s’approprier des lieux ingrats ou quelconques – « l’arbre de l’amitié », bien sûr, mais aussi cette grosse pierre à un carrefour, assortie de ce commentaire : « Après l’école, on va discuter sur notre rocher kitkat ».

Par une étonnante coïncidence, cette exposition est présentée dans la commune même où je viens d’entendre des propos d’adultes sur « les-jeunes-qui-ne-sortent-plus-de-chez-eux », tandis que dans une commune limitrophe est présentée une autre exposition photo de plein-air consacrée aux quartiers HLM de la ville et dans laquelle n’apparaît aucun jeune. Voilà qui rétablit un peu l’équilibre. Merci à la commune d’Inzinzac-Lochrist, à Stéphanie Tétu et au Département du Morbihan d’ouvrir notre regard sur cet univers des ados, si souvent méconnu ou méprisé.

Date de l’article d’origine : 2 mai 2018

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