Revu la semaine dernière « Fanny et Alexandre », chef d’œuvre d’Ingmar Bergman qui s’achève sur cette étrange et provocatrice phrase de Strindberg : « Tout est possible. Le temps et l’espace n’existent pas. Sur une mince couche de réalité, l’imagination ne cesse de tisser et dénouer ses motifs ». N’y aurait-il pas comme un lien avec l’article précédent, déposé par mon camarade Apus ? Les espaces de détente et de jeu ne peuvent-ils pas aussi nourrir l’imaginaire des enfants comme des adultes ?
Un élément de réponse nous est donné dans ce blog par l’ethnobotaniste Pierre Lieutaghi lorsqu’il évoque, dans la campagne bretonne de son enfance, les arbres creux des talus que les enfants prenaient pour des châteaux-forts à assiéger ou à défendre, l’aventure s’alliant alors à l’imaginaire pour produire des sensations inoubliables. Pour les plus contemplatifs, la moindre pièce d’eau peut aussi alimenter l’imagination, comme nous l’indique (aussi dans ce blog) Gaston Bachelard, auteur de L’eau et les rêves. Selon que l’eau est claire ou opaque, courante ou stagnante, qu’elle reflète le ciel ou qu’on en voie le fond, elle suscite en nous des états différents et peut nous propulser au-delà du réel. Et lorsque Proust évoque les feuilles d’automne dans les parcs publics, il remarque qu’elles évoquent la mort lorsqu’elles tombent, mais aussi une possible renaissance lorsqu’on les foule aux pieds. A moins d’être complètement stériles (et encore, il reste au moins le ciel et les nuages, pour qui s’allonge dans l’herbe ou sur un banc !), les espaces extérieurs sont aussi des lieux où lâcher prise et laisser notre imagination partir à la dérive.
Date de l’article d’origine : 31 janvier 2018