La vie sociale des petits espaces urbains : les espaces pour s’asseoir (6)

(suite de la traduction de « The Social Life of Small Urban Spaces », de W.H. Whyte)

Il y a une autre considération qui est plus importante : c’est la face arrière de l’être humain. C’est une dimension que les architectes semblent avoir oubliée. Vous verrez rarement un banc ou un muret suffisamment large pour être asseyable des deux côtés ; certains ne sont d’ailleurs même pas assez larges pour que l’on s’y assoie d’un seul côté. Plus irritantes sont les corniches ou murets juste assez larges pour inciter les gens à s’assoir des deux côtés, mais trop étroits pour leur permettre de le faire confortablement. Observez de tels endroits, et vous allez voir les gens tenter des ajustements maladroits. Les bancs de la plaza General Motors illustrent bien le propos. Ils font 61 cm de large et sont en général utilisés d’un seul côté. Le dimanche, toutefois, ils sont pris d’assaut par des touristes et d’autres gens qui cherchent à s’assoir des deux côtés. Mais pas dans le confort : ils doivent s’assoir sur le rebord, bien droits, et leur comportement raide suggère une négociation tacite.

Nous en arrivons à une autre de nos surprenantes découvertes : les espaces suffisamment larges pour que l’on puisse s’y assoir dos à dos sont plus confortables que ceux qui sont moins larges. Si 76 cm (30 pouces) sont acceptables, c’est mieux avec 91 cm (36 pouces). A cet égard, les nouvelles règles d’urbanisme donnent une bonne incitation : si une corniche ou un banc fait 30 pouces de large et est accessible des deux côtés, le constructeur est crédité du linéaire asseyable de chaque côté (cette règle des 30 pouces est très empirique : elle vient d’une corniche du 277 Park Avenue, qui présente la largeur minimale pour être régulièrement utilisée des deux côtés). Pour quelques pouces de largeur supplémentaire, le constructeur peut donc doubler l’espace asseyable. Cela ne va pas forcément doubler le nombre de personnes à venir s’assoir – tout le monde ne viendra probablement pas, mais ce n’est pas le problème. Le bénéfice de cet espace supplémentaire, c’est le confort social : plus d’espace pour permettre aux groupes et aux individus d’y trouver leur place, plus de choix, et une meilleure perception du choix.

Photo : bancs « double face » à Montréal. Un dossier évite les contacts et apporte du confort physique et social. La capacité est utilisée à son maximum.

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