Comment intégrer dans les politiques publiques la question des usages de l’espace par le public ? Nous avons abordé ce sujet depuis le début de ce blog et constaté, lors d’un petit bilan en novembre dernier, que les politiques en lien avec l’aménagement du territoire au sens large ont chez nous du mal à intégrer ce thème ; un exemple parmi d’autres en est fourni par les trames vertes et bleues.
Une fois de plus, un éclairage intéressant nous arrive de Suède, un pays qui conserve quelques longueurs d’avance en matière d’environnement et de planification urbaine. Aux politiques de trames vertes, qui y ont été développées dans les années 1990-2000, succède aujourd’hui un travail sur les « services écosystémiques ». Beaucoup de communes se sont en effet lancées dans des recensements très élaborés des services rendus par les espaces verts et espaces naturels, en vue de les intégrer dans leurs documents d’urbanisme, en l’occurrence ceux comparables à nos SCOT (schémas de cohérence territoriale). Ces services englobent des thèmes variés, tels que les réseaux écologiques, la biodiversité, les fonctions productives, les fonctions régulatrices, et aussi les fonctions sociales.
Un « webinaire » (réunion interactive par internet) organisé sur ce thème par le bureau d’études Ekologigruppen (que nous avons visité lors de notre voyage d’étude de l’an dernier) a fait le point sur la question en présentant plusieurs exemples concrets. Et c’est là que nous retrouvons nos chers sociotopes, comme sur la commune d’Upplands Väsby (37 000 habitants) où la carte des sociotopes a servi à construire la carte des services écosystémiques, laquelle constitue une pièce maîtresse du projet d’aménagement du territoire. Ce travail, qui a duré deux ans, a coûté environ 100 000 € et a aidé la commune à se classer à la troisième place des « meilleures communes pour l’environnement ». La présentation du webinaire apporte d’autres exemples, comme la commune de Borlänge qui a recensé ses carences en espaces verts, ou celle de Haninge où une enquête auprès des habitants a permis de recenser et caractériser les valeurs sociales attachées aux espaces verts (santé, loisirs, relations sociales, éducation, connaissance, calme, inspiration, valeur esthétique).
Un enseignement de ces expériences serait peut-être que l’on pourrait envisager chez nous de dépasser la notion (au demeurant très utile) des trames vertes et bleues pour travailler au niveau des territoires de SCOT sur la notion de services écosystémiques, qui est plus englobante et permettrait peut-être enfin d’accorder aux fonctions sociales le même niveau d’intérêt qu’aux autres fonctions écologiques. Cette approche semble déjà pratiquée ici ou là, peut-être serait-il temps de passer à la vitesse supérieure, d’autant que les systèmes d’information géographique facilitent aujourd’hui ce genre de travail.
Illustration : commune d’Upplands Väsby, carte des espaces d’interactions sociales, éloignement par rapport à l’habitat et identification des secteurs de carences.
Date de l’article d’origine : 1er mars 2017