La carte mentale est un dispositif très simple et efficace pour savoir comment un territoire donné est perçu et pratiqué par ses habitants. Elle est aussi un bon outil pour l’animation d’ateliers publics. Elle peut être utilisée dans des domaines variés, mais pour ce qui nous concerne, elle permet d’obtenir rapidement des informations sur la façon dont des habitants pratiquent les espaces extérieurs. Cette méthode est connue depuis longtemps en psychologie, mais c’est à l’urbaniste américain Kevin Lynch que l’on doit de l’avoir mise en œuvre dans le domaine de l’urbanisme dès les années 1950 (voir L’Image de la Cité, 1960). Les travaux de Mme Tsoukala sur « les territoires urbains de l’enfant » (voir plus bas) reposent aussi en partie sur l’utilisation de cartes mentales.
Le principe est simple, il s’agit de donner à une personne, ou à plusieurs personnes travaillant en petits groupes, une grande feuille blanche, des marqueurs de couleur et des gommettes, en leur demandant par exemple de dessiner leur ville ou leur quartier en faisant apparaître les lieux qu’ils fréquentent, qu’ils aiment ou qu’ils n’aiment pas, les itinéraires empruntés, les problèmes rencontrés, etc. Il est intéressant de faire travailler les gens par groupes de quatre ou cinq, pas plus, car les participants peuvent s’aider mutuellement à construire la carte et avoir des échanges productifs.
Le processus de construction de la carte est un aspect essentiel du dispositif, c’est pourquoi il est nécessaire d’avoir à chaque table un observateur / animateur qui note l’ordre d’apparition des éléments et les thèmes faisant débat. Le démarrage peut parfois être un peu laborieux (le vertige de la feuille blanche !) et l’animateur peut avoir à donner un petit coup de pouce en apportant des suggestions. Au terme du processus, qui peut durer par exemple 30 minutes, on peut prévoir une présentation de chaque carte par ses auteurs devant l’ensemble des participants. La diversité des cartes fait apparaître celle des pratiques et des représentations subjectives, mais on peut également voir émerger des points de consensus.
Les cartes constituent des éléments de connaissance appréciables dans le cadre de l’élaboration de toutes sortes de projets, elles peuvent illustrer des documents, et les ateliers font partie de la gamme des actions dites « de concertation » avec le public. Les échanges, en général animés, permettent de « briser la glace » très rapidement entre des gens ne se connaissant pas. Ils permettent aussi à tout le monde de s’exprimer, les « monsieur-je-sais-tout » qui parlent fort dans les réunions publiques n’étant pas forcément les plus à leur aise lorsqu’il s’agit de travailler avec le crayon en main.
Il apparaît donc que la carte mentale constitue un complément utile aux études de sociotopes, comme nous avons pu le constater. Parce qu’elle est simple à mettre en œuvre, elle peut être utilisée aussi bien par des groupes d’habitants que dans des petites communes. Un risque est cependant de remiser trop rapidement les cartes au placard, faute de savoir les exploiter correctement, et l’intervention de professionnels peut aider à extraire de ce genre de travail un maximum d’informations utilisables pour une bonne planification. Il est conseillé de produire, à l’issue d’ateliers de cartes mentales, un rapport écrit listant les enseignements de l’opération et proposant des des idées pour les intégrer dans des projets, et bien sûr de diffuser ce document aux participants.
Illustrations : deux cartes mentales du même territoire. Date de l’article d’origine : 29 mars 2017.