Dans son livre qui vient de paraître, « Closer together : This is the future of cities », notre ami et inspirateur Alexander Ståhle raconte l’histoire suivante :
Lors de la conférence internationale sur les espaces publics qui s’est tenue à Stockholm en 2015, il avait été prévu de créer des mini-parcs sur des places de stationnement afin de montrer comment l’espace des rues peut être utilisé et changé. L’association Happy Sweden a demandé aux autorités locales l’autorisation de placer quelques chaises de pique-nique sur une place de stationnement pour une durée de trois heures. Cette démarche s’est révélée être une entreprise de grande ampleur, car il fallait d’abord une autorisation délivrée par la police (100 $), sous réserve de fournir un plan avec toutes les cotes. La police devait ensuite transmettre la demande au service municipal de la circulation et aux autres organismes compétents. Ce service, à son tour, demandait un plan expliquant comment le trafic serait affecté. Ce plan devait être produit par un bureau d’études indépendant moyennant rétribution. La municipalité devait ensuite approuver le plan (coût : 225 $). Au surplus, le fait d’utiliser une place de stationnement nécessitait de placer un bloc de béton à chaque extrémité ; coût de la location et de la pose : 375 $. Il fallait ensuite ajouter les frais de signalisation, ainsi qu’un droit d’occupation de l’espace public pour un montant de 20 $ par mètre carré, soit 190 $ la journée. Le coût total de l’installation de ces chaises devait ainsi se monter à un minimum de 1125 $, pour un délai d’instruction du dossier compris entre deux et trois mois.
On notera qu’une fois l’autorisation obtenue, elle ne garantit pas contre l’occupation de l’espace par une voiture en stationnement, laquelle ne saurait être enlevée car elle ne constituerait pas un obstacle à la circulation.
Finalement, les membres de Happy Sweden choisirent une autre stratégie. Ils décidèrent de mettre leur projet sur des roues : ils placèrent les chaises sur une remorque, la garèrent à l’emplacement prévu et payèrent à l’horodateur. Ce parc de poche était devenu licite et simple à mettre en œuvre du fait qu’il avait des roues.
Pour Alexander Ståhle, « c’est un intéressant exemple du pouvoir du trafic automobile : le fait que les règlements qui s’appliquent à l’espace public donnent la priorité aux voitures privées par rapport à l’activité humaine. On voit ainsi le poids de l’inertie dans le domaine légal ; vous avez besoin d’imagination et d’une bonne stratégie pour réussir ».
Date de l’article d’origine : 22 novembre 2016.