Depuis hier, la presse a abondamment présenté l’étude intitulée « Où rencontre-t-on son premier partenaire sexuel et son premier conjoint ? », réalisée par deux chercheurs de l’INED (Michel Bozon et Wilfried Rault), couvrant la période de 1960 à 2006 et tout juste publiée dans Population et Sociétés.
On a beaucoup commenté le spectaculaire déclin du bal, la désaffection récente pour les boîtes de nuit et la montée en puissance des fêtes privées, mais pas tellement l’importance prise par l’espace public parmi les lieux de rencontres décisives. Le graphique publié dans l’étude montre pourtant que les « lieux publics », incluant les transports collectifs, voient s’effectuer 15 à 16 % des rencontre selon le sexe, contre moins de 10 % pour les boîtes, avec une augmentation légère et régulière au fil des ans. En revanche, la catégorie « voisinage, rue, quartier » est en diminution sensible (de 12-13% à 5-6%), ce qui semble traduire un certain délitement des liens sociaux de proximité. Il serait tentant de corréler ces données en suggérant que la rencontre se déplace du territoire local et vécu à des lieux plus anonymes et des territoires plus neutres.
Laissons donc les spécialistes analyser ces données, et recentrons nous sur le propos de ce blog : si vous voulez avoir une illustration du rôle de l’espace public dans la rencontre amoureuse, pour le cas où vous resteriez à convaincre, regardez donc le film« The social life of small urban spaces » réalisé par W.H. Whyte dans les années 1970 sur la place devant l’immeuble Seagram à New-York (si vous n’avez pas le temps de le voir en entier, ce qui serait dommage, débutez la vidéo à 6 minutes, la séquence dure 45 secondes). Le réalisateur facétieux nous montre même un des tourtereaux en pleine action jetant un coup d’œil à sa montre, pour voir peut-être s’il ne peut pas encore grappiller quelques minutes supplémentaires. Vidéo visible ici [lien disparu au 25/3/2020].
Et si vous ne vous reconnaissez pas dans cette hétérosexualité triomphante qui s’affiche à la vue de tous, vous pouvez aller voir ici [lien disparu] comment quelqu’un parle de son « jardin extraordinaire », à la fois espace naturel et lieu de rencontres discret à la marge de la ville. Un beau témoignage, qui peut nous inciter à regarder différemment ce genre de lieux qui effraient les honnêtes gens.
Date de l’article d’origine : 25 janvier 2013